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Histoire des Guérin - 04 - Les temps Barbares

(rédaction 18.4.92)

 

 

 

 

4. LES TEMPS BARBARES

 

 

SAINT GUERIN COMTE DE PARIS (626-678)

 

            Guarinus était le frère cadet de dix ans de Chlodgar[1]. Leur père était saint Arnulf (-667) évêque de Metz, comte du pays de Moselle et marquis d'Anvers. Lui-même descendait de quatre autres générations de marquis d'Anvers dont le plus ancien, Othel de Boulogne (mort en -541) était le premier duc de Moselle : primus dux Mosellane. Ce dernier avait épousé Clotilde, petite fille de Clovis. La mère de Guérin et de Chlodgar était sainte Dode de Boulogne. Que le lecteur ne soit pas étonné de trouver tant de saints dans une même famille. Elle ne fait pas exception en cela à une époque où la béatification et la canonisation semblent avoir été octroyées avec une certaine générosité.

 

            Nés tous ceux à Sarcinium[2] en Neustrie, ils étaient les neveux de Didon, ou encore Dudo, seizième évêque de Poitiers. Leur autre frère aîné était Clodulphe (-682) qui hérita du comté de Moselle et du marquisat d'Anvers alors que Chlodgar et Guérin se taillaient chacun une situation élevée en Gaule, le premier dans l'église et le second dans la noblesse. Avec tant de saints et de seigneurs dans la famille, ils bénéficiaient au départ d'un appréciable piston pour réussir.

 

* * * * *

 

            Clodgar, que nous appellerons désormais Léger, avait été remarqué par son oncle Didon qui l'avait fait nommer diacre à Poitiers. Il en fit son archidiacre alors qu'il avait vingt-deux ans. Il avait pour cela de solides qualités de chasteté, de piété et d'efficacité administrative. Pour ces divers motifs, il fut nommé abbé de Saint Maixent[3] en 650 ou 653. La reine Bathilde[4], avertie de sa renommée, l'appela à la cour en 656 où il assista au concile de 660 comme rapporteur de l'évêque d'Autun, concile qu'il domina aisément grâce à sa personnalité déjà puissante. Le couronnement de sa carrière vint en l'an 663 lorsqu'il fut élu à son tour évêque d'Autun.

 

            La carrière de Guérin fut tout aussi brillante. Il fut nommé comte de Paris en 654. On trouve mention de son nom au bas d'une charte de Clovis II[5] datée de 654, traitant de l'abbaye de Saint-Denis, puis sur un autre document de 658 sous Dagobert II[6] qui intéressait Saint-Maur des Fossés.

            Paris n'était alors qu'une bourgade de faible importance, bien que le grand Clovis l'ait choisie autrefois comme capitale, sentant le besoin de se stabiliser quelque part. Elle était encore enfermée dans les murs de l'île de la cité, donc beaucoup moins importante que ne l'étaient d'anciennes métropoles comme Laon ou Soissons.

            Le comte Guérin épousa Sigrée, fille d'un certain Ansoud, probablement duc de Thurgovie et de Syrade d'Ostrevent. Il aura trois enfants. Le premier sera Guérin Ier, dont nous parlerons plus loin et qui épousera Gunza de Trèves, fille d'Hedeno, duc de Thuringe. Il sera l'ancêtre de Charlemagne, mais aussi des comtes de Thurgovie et de ceux de Mâcon. Sa fille Sigrée épousera un certain Chrodbert et leur dernier fils, Léger suivra la voie tracée par son oncle de même nom et sera comme lui évêque d'Autun.

 

* * * * *

 

            A cette époque Clovis II avait rassemblé les royaumes francs à la mort de son frère Sigebert III en 656. Bathilde, qu'il avait épousée alors qu'il n'avait lui-même que douze ans, lui avait donné trois fils. Le premier, Childeric II (650-675) sera roi d'Austrasie, le second Clotaire III (654-673), roi de Neustrie et de Bourgogne. Le troisième, encore dans les langes, Thierry III (656-691) aura une vie plutôt mouvementée, mais nous n'en parlerons qu'autant elle intéresse nos deux personnages. Faute de cette censure volontaire le lecteur ne pourrait suivre les événements.

            Les deux futurs saint Guérin et saint Léger vivaient dans l'état rival de Neustrie et de Bourgogne. Clotaire III[7] y était monté sur le trône à l'âge de trois ans sous la direction effective d'Ebroïn[8], maire du Palais depuis 657. Lorsque Clotaire III fut assassiné en 673, Ebroïn assembla les grands de Neustrie et leur imposa le frère du défunt qu'il présenta comme son fils, on ne sait d'ailleurs pourquoi, et le fit couronner sous le nom de Thierry III[9]. Ebroïn en profita pour inaugurer un gouvernement à poigne et tenter de rabaisser le pouvoir des grands feudataires et mettre à leur place des nouveaux venus issus de la petite administration.

            C'est une menace que les dirigeants et possédants de toutes les époque n'ont jamais appréciée, ceux ci faisant toujours une nette distinction entre les arrivés, lorsqu'il s'agit d'eux-mêmes, et les parvenus, lorsqu'il s'agit des autres. L'évêque Léger l'avait bien ressenti de cette manière. Il prit la direction du soulèvement de l'aristocratie et du haut clergé de Bourgogne et de Neustrie contre Ebroïn et fit appel au roi d'Austrasie.

 

            C'était l'occasion rêvée pour l'Austrasien Childeric II de s'occuper des affaires de Neustrie pour s'emparer du royaume rival. En cette même année 673, aidé de l'évêque Léger, du comte Guérin de Paris et des autres grands feudataires révoltés, il parvint à chasser Thierry III, qui dûment tonsuré, fut enfermé à Saint-Denis pour qu'il puisse à son aide réfléchir sur la vanité des biens de ce monde. Il exila Ebroïn à Luxeuil et s'empara aisément de la Neustrie et de la Bourgogne. Léger, désormais maire du palais d'Austrasie, organisa la mise en tutelle de la Neustrie. Le premier acte était accompli et Childeric III avait à nouveau unifié les royaumes mérovingiens.

 

* * * * *

 

            Mais comme cela ne lui suffisait pas, l'Austrasien Childeric se réconcilia avec Ebroïn, dans l'intention de régner grâce à lui sur toute la Gaule. Un revirement en appelle un autre. Léger et Guérin se retrouvèrent dans l'opposition à la fois contre Ebroïn et contre Childeric qui leur avait joué un sale tour qu'ils n'avaient pas digéré. Childeric ne devait pas régner longtemps. Il fut assassiné en 675 par un seigneur qu'il avait fait condamner à la bastonnade publique. Mais entre-temps, il avait déclenché deux guerres civiles en Gaule. La première opposait Austrasiens et Neustriens, la seconde Ebroïn et l'aristocratie des deux états, une lutte entre la droite et la gauche.

 

            Le neustrien Thierry III en profita pour reprendre le trône de Neustrie et en chasser Ebroïn qui l'avait trahi de si belle façon. Ebroïn, passé dans le camp austrasien en profita pour faire élire Clovis III, le troisième fils de la reine Bathilde, qu'il présenta comme le fils de Clotaire III de Neustrie alors qu'il était en réalité son frère. Mais il n'était pas à cela près et les royaumes mérovingiens en avaient vu bien d'autres. Après avoir vaincu Thierry III à Baizieux près de Corbie, Ebroïn était devenu le plus puissant personnage de Neustrie autant que l'arbitre de la situation. Il abandonna Clovis III et rappela le vaincu Thierry III pour régner en son nom, celui ci ayant entre-temps laissé repousser ses cheveux.

 

* * * * *

 

            Il aurait pu le faire sans difficulté s'il n'avait eu contre lui l'opposition farouche des nantis, et en particulier de Léger et de Guérin qu'il considérait comme ses deux principaux adversaires. On assistait à la lutte entre un parvenu aux idées avancées, entreprenant, efficace et sans scrupules contre les grands du royaume jaloux de leurs privilèges. Disons pour simplifier qu'il s'agissait de savoir si la gauche ou la droite gouvernerait le pays à son seul avantage.

            Assiégé dans Autun par Waymar, duc de Champagne et Didon, évêque de Chalons, Léger se sachant perdu, distribua ses biens avant de se rendre à Ebroïn qui le fit déposer par un concile à sa dévotion. Il en confia la garde à un certain Waning, ancien conseiller de la reine Bathilde, que l'on désigne également sous les noms de Wanelon, ou encore Ganelon. Il le fit ensuite torturer, lui fit crever les yeux, arracher les oreilles, trancher les joues et les lèvres avant de lui faire couper la langue. Deux ans après sa déposition, Léger fut condamné à mort. On le laissa cependant s'échapper malgré ses horribles blessures, puis les sbires d'Ebroïn lui tranchèrent la tête. C'était en 678.

 

            Arrêté près de Vergy en Bourgogne, le comte Guérin fut accusé à son tour d'avoir été l'un des instigateurs de l'assassinat de Childeric II en 675. On lui confisqua son comté pour le confier à Ganelon. Condamné par Ebroïn, Guérin fut attaché à un poteau et lapidé en 678.

            Ebroïn était maintenant le maître incontesté de toute la Gaule. Il vainquit Pépin d'Heristal[10] au Latofao près de Laon en 680. Mais il existe quand même une justice chez les Mérovingiens. Ebroïn fut finalement assassiné en 683 par un tueur envoyé par les Austrasiens.

 

* * * * *

 

            Sitôt après leur mort, l'évêque Léger et le comte Guérin furent considérés comme martyrs et canonisés par un concile qui par prudence bien comprise, s'était rassemblé loin des atteintes d'Ebroïn. Tous deux devinrent rapidement l'objet d'une vénération générale et leur culte se développa à Autun, à Brogne et à Poitiers.

            Une Vie de Saint Léger fut composée à Autun à la fin du dixième siècle. C'est l'un des plus anciens monuments de la langue française. Il se présente sous la forme d'une complainte de quarante groupes de chacun six vers octosyllabiques. Les deux fêtes de saint Guérin et saint Léger sont fixées le 2 octobre.

 

            Quand beaucoup plus tard, les moines de Saint-Maixent durent fuir les invasions danoises du neuvième siècle, ils se réfugièrent à Ebreuil[11] avec leurs reliques en 898, où ils fondèrent un nouveau monastère en 906. Après bien des péripéties, saint-Guérin s'était retrouvé dans un tombeau érigé en l'église Saint-Vincent sous Vergy en Bourgogne. On le montrait encore au dix-huitième siècle. Ses reliques seraient actuellement en l'église Saint-Léger de Cognac.

            En raison de son nom, saint-Léger fut brocardé au cours des âges. On en fit le patron protecteur des obèses. On ne sait si l'intéressé aurait compris la plaisanterie, car la nouvelle langue française, qu'il ne parlait pas de son vivant, permettait maintenant ce jeu de mots plutôt facile.

 

BIBLIOGRAPHIE: Lefevre : “Vie de Saint-Léger, évêque d’Autun” - J.Saillot : “Généalogies médiévales” - abbé M.Chaume : “Dictionnaire bibliographique Français” 1882 T.15 - Godescard : “Vie des principaux martyrs” T.X p.54 -

 

GUERIN 1er COMTE DE PARIS (?-715)

 

            Il est le fils du personnage précédent, Saint-Guérin et sa femme Sigrée. Il épousa Gunza de Trèves, fille d'Hédéno, comte de Thuringe et sœur de Basin, évêque de Trèves. Il représente aussi l'un des seize quartiers d'ascendance de Charlemagne, mais je n'ai trouvé aucune mention sur sa date de naissance, ni sur ses activités en tant que comte de Paris, ni même comment il a recouvré le comté de son père qui l'avait perdu dans les circonstances que l'on sait.

            Ses enfants furent, le premier Saint Lièvin (?-717) de Trèves qui épousa Adélaïde de Worms, fille de Chlotar de Worms et d'Adelinde. Le second fut Grimbert qui lui succéda au comté de Paris. Leur fille Rotrude (?-724) de Trèves épousera Charles Martel[12] et sera donc la mère de Pépin le Bref[13] et l'aïeule de Charlemagne. Comme le père du personnage descendait lui-même de Clovis, il faisait donc la liaison généalogique entre les Mérovingiens et les Carolingiens.

            Le lecteur peut légitimement se poser des questions sur la descendance des évêques. C'était que le célibat des prêtres est d'un usage relativement récent en tout cas ne constituait pas une obligation à l'époque. Le célibat n'était que conseillé mais nullement imposé, surtout si le nouveau prêtre se trouvait encore marié. Il ne sera imposé qu'au concile de Latran en 1123 qui excluait les hommes mariés de la prêtrise. Le prétexte en était qu'ils auraient pu être distraits de leur saint ministère par les soucis familiaux, leurs querelles conjugales toujours possibles et la surveillance de leurs enfants dont on ne pouvait prévoir la mauvaise conduite. En réalité, n'ayant pas d'héritiers l'église empochait leur héritage. C'était la vraie raison.

 

* * * * *

 

            Notre personnage fut tout d'abord comte de Poitiers avant d'être comte de Paris. On trouve une mention le concernant en 710 dans un acte de Childebert III[14], concernant l'abbaye de Saint-Denis. A moins qu'il ne s'agisse de son père Saint-Guérin, une mention sans date précise qu'il possédait une villa mérovingienne à Noisy sur Oise, près de Luzarches[15].

            Guérin, comte de Paris est l'ancêtre de nombreux personnages du même nom et en particulier les comtes de Thurgovie et ceux de Mâcon. Son fils Guérin de Thurgovie fait l'objet du prochain paragraphe. Son descendant de Macon au neuvième siècle conservera la Bourgogne à la France lors du traité de Verdun en 843. Nous le trouverons lors d'un prochain chapitre.

            Le comte Guérin est aussi l'ancêtre des Guérinides de la vallée du Rhône qui participeront à la conquête de la région sur les Arabes. Cette famille a compté parmi les plus célèbres de l'époque. Nous la verrons au prochain chapitre.

 

BIBLIOGRAPHIE: D.Dooghe : “Olivier de Roncevaux, histoire ou légende ?” Lille 1987 - idem : “Histoire généalogique de la Francie du cinquième au douzième siècle” Lille 1985-

 

GUERIN III, COMTE DE RHETIE

 

            Guérin III est le fils de Guérin II, comte de Thurgovie et de sa femme Adalinde. Il descend donc de Saint-Guérin, comte de Paris comme on l'a vu précédemment. Il participa à l'expédition en Espagne, à la prise de Saragosse et au désastre de Roncevaux le 15 août 778.

            Guérin III était comte de Rhétie[16], une ancienne province romaine située le long du cours supérieur du Rhin dont la capitale était Coire (Curia Rhetorica). Quand Charlemagne conquit la Bavière et le pays des Avars, il confia le comté d'Istrie à Guérin.

            Guérin, comte de Rhétie, était le frère de Mile (?-798), comte de Narbonne. Ce dernier, devant partager son comté avec Aimery de Narbonne, le héros de la chanson de geste, Mile, de ce fait ne porta plus que le titre de vicomte de Narbonne. Guérin III meurt en l'an 800.

 

WARIN OU GUERIN, COMTE D'ALEMANIE

 

            En Alémanie, Theutbald, frère du duc Lantfrid[17], que Charles Martel avait récemment soumis, avait cherché à recouvrer son indépendance. Charles sera contraint de laisser régner Theobald en 730 sous sa simple suzeraineté nominale.

            La mort de Charles Martel en 741 ouvrira une crise de succession et les provinces récemment soumises tenteront de secouer le joug franc. Ses deux successeurs Carloman[18] et Pépin le Bref seront contraints de lutter pendant six ans pour conserver l’œuvre de leur père.

 

* * * * *

 

Plusieurs campagnes devront être menées contre les Alamans aux cours desquelles Carloman s'imposera par la terreur en massacrant une partie de la noblesse alémanique. Conquise à nouveau, l'Alémanie fut partagée en deux territoires, chacun d'eux étant gouverné par un comte franc. Ce furent Warin et Ruthard. Ce dernier est l'ancêtre de la famille bavaroise des Welfs. Les deux comtes sont les fondateurs des abbayes de Gegenbach et Schultern. Ils mettront sous autorité franque celles de Reichenau[19] et de Saint-Gall. Plus au sud, ils protègent la principauté ecclésiastique de Coire et contrôlent les passages vers l'Italie du nord.

 

RONCEVAUX

 

            Cette période, généralement mal connue se situe entre l'année 720, date à laquelle les Arabes s'installent dans le sud de la Gaule, l'année 732 où ils furent heureusement arrêtés devant Poitiers par Charles Martel, les campagnes de Pépin le Bref qui permirent la reconquête des territoires perdus et enfin celles de Charlemagne qui malgré le désastre somme toute limité de Roncevaux, nous vaudra la conquête de nouveaux territoires sur les marches d'Espagne.

            C'est pourquoi il faut revenir sur les divers événements qui s’étaient déroulés avant de parler de ceux qui y ont pris part. Beaucoup semblent sortir des brumes de la légende depuis que les textes d'autrefois en ont fait des preux et des héros de chansons de geste. Il n'en demeure pas moins vrai que ces personnages ont réellement existé et que les trouvères du douzième siècle se sont servis d'un fonds historique incontestable.

            Les Arabes ont atteint la Gaule au début du huitième siècle. Débarqués à Gibraltar le 8 avril 711, ils avaient immédiatement anéanti l'armée wisigothe le 19 juin à Guadalete, près de l’actuelle Medina Sidonia (province de Cadix). C’était une victoire complète à tel point que le roi Rodrigue fut tué au cours du combat et que son royaume disparut avec lui. Les émirs de Cordoue qui avaient pris sa place, entreprirent alors une série de raids de pillage au nord des Pyrénées, s'emparèrent de Narbonne en 720 et de Nimes en 725.

            De là, ils envahirent la vallée du Rhône en 731 et se divisèrent en deux groupes, le premier allant piller Langres et Dijon et le second, Autun, Saulieu et Avallon, mais se firent battre devant Sens par les troupes de saint Eblon, évêque de la ville. Surpris par cette résistance inattendue, ils se dirigèrent vers l'ouest, s'emparèrent de Bordeaux, puis de Poitiers au début de l'année 732. En marche vers Tours où ils escomptaient un fabuleux butin, ils furent enfin vaincus le 17 octobre 732 devant Poitiers par Charles Martel.

 

* * * * *

 

            Ils se contentèrent désormais de piller la vallée du Rhône en 736 et 738. Comme il en avait été de l'Espagne, la Gaule avait bel et bien failli être un nouveau royaume arabe. Les minarets auraient pris la place des clochers. Nous aurions eu plusieurs femmes, elles auraient été voilées, nous aurions été circoncis, aurions appris à roter à table et des ayatollahs nous gouverneraient probablement de nos jours pour la plus grande gloire d'Allah, mais certainement pas pour la nôtre. L'Europe avait échappé à un grand danger. On ne s'en rend pas toujours bien compte.

            Pépin le Bref, fils de Charles Martel prit alors l'offensive en 757. Il s'emparait de Narbonne en février 759 et y installait le comte Mile fils de Guérin III de Thurgovie qui la gouverna de 759 à 798. Lors des campagnes de 760-768, Pépin libérait entièrement l'Aquitaine, y installait un comte carolingien et s'en instituait le protecteur.

            En cette même année, le lointain calife de Bagdad envoyait à Pépin le Bref une ambassade chargée de présents. Cela représentait certes un geste d’un certain apaisement, mais la menace était toujours latente à la frontière espagnole, car Abd-er-Rahman[20] avait fondé le nouvel émirat oméyade à Cordoue en 756 et rétabli l'unité musulmane espagnole. Il avait organisé les camps retranchés de Saragosse, de Huesca et de Barcelone. Il pouvait donc négliger les deux petits états encore indépendants, celui des tribus basques et le petit royaume chrétien des Asturies, beaucoup trop faible pour représenter une menace quelconque.

            Abd er Rahman n'avait pas réunifié l'Espagne musulmane sans faire de jaloux. Plusieurs seigneurs arabes mécontents se présentèrent en 777 à l'assemblée de Paderborn. Le premier était Soliman ben al Arabi, gouverneur de Barcelone, et bien entendu en révolte contre l'émir, son suzerain. Il proposa à Charlemagne de lui livrer plusieurs places fortes du nord de l'Espagne et l'assura même du concours de trois autres seigneurs dépossédés.

 

            L'offre était certes alléchante. Il s'agissait en réalité d'un malentendu. Soliman voulait seulement que Charlemagne l'aide à se rendre indépendant en échange de quoi il lui aurait rendu hommage. Mais de son coté, Charlemagne comprenait l'allégeance comme le droit qu'il aurait eu de disposer de son vassal et de ses terres comme c'était l'usage en Gaule. C'est sur ce regrettable manque de précisions que Charlemagne se lancera dans l'aventure espagnole.

 

* * * * *

 

            Il envoya deux armées en Espagne. La première longea la vallée du Rhône, traversa la Septimanie[21] en direction de Barcelone. La seconde, sous sa propre direction, franchit le col de Roncevaux et s'empara de Pampelune presque sans combats. Pendant ce temps, Soliman ibn al Arabi s'était emparé de Saragosse et avait repoussé une armée omeyade.

            Charlemagne reçut la soumission de Soleiman et d'un autre gouverneur qui lui remit des otages. Pendant ce temps la première armée arrivait à Saragosse pour en prendre possession. Tout paraissait aller au mieux dans le meilleur des mondes carolingiens quand se produisirent deux regrettables incidents diplomatiques qui devaient modifier considérablement le cours de l'histoire. Le premier était une nouvelle révolte des Saxons. On y était bien habitué depuis longtemps, mais on aurait pu penser qu'ils se seraient tenus tranquilles après les campagnes que l'on avait menées contre eux sans aucune douceur. Le second fut que le seigneur arabe refusa de livrer Saragosse et repoussa les Francs en malmenant quelque peu leur prestige.

 

            Charlemagne, ne pouvant pas lutter sur deux fronts, à la fois contre les Arabes et contre les Saxons, abandonna l'entreprise et détruisit Pampelune avant de reprendre le chemin du retour par Roncevaux.

            Mais les tribus basques n'avaient pas tellement apprécié la présence franque ni leurs réquisitions. Elles profitèrent de la situation pour attaquer l'arrière-garde au col de Roncevaux où elles avaient organisé une embuscade en raison des épaisses forêts[22]qui s'y trouvaient alors. Les Basques laissèrent passer le gros de l'armée qui ne s'était rendu compte de rien. Celle ci, une fois éloignée, ils se jetèrent sur l'arrière-garde qui présentait pour eux l'avantage de convoyer les vivres et le butin. Les Francs, inférieurs en nombre, dans une situation difficile et lourdement armés, ne purent résister à un groupe de partisans qui avait pour lui le nombre et la position stratégique. C'était le 15 août 778. Personne n'en réchappa.

 

GUERIN COMPAGNON DE ROLAND

 

            Tout le monde connaît plus ou moins la Chanson de Roland et en a gardé une certaine vision générale. Elle nous livre le nom des douze pairs qui périrent à l'arrière-garde. Parmi eux figure deux compagnons d'armes, les deux comtes Guérin et Gérier. Pas autrement désigné, on ignore l'identité du premier. Mais du moins connaît-on le nom de son cheval : Sorel en lisant le vers 1381. Quant à Gérier, on sait qu'il était comte de Paris et avait épousé Rotrude, la fille de Carloman[23]. Ils seront parmi les premiers au combat, mais tomberont aussi parmi les premiers. Il suffit de lire la Chanson de Roland :

 

..et Guérin frappe Malprimis de Brigal. Son beau bouclier ne lui vaut rien, il lui brise la boucle de cristal. Une moitié tombe à terre. Le haubert est brisé jusqu'à la chair. Il lui enfonce son bon épieu dans le corps. Du coup, le païen s'effondre. Satan emporte son âme

 

            La lutte était trop inégale. La défaite était prévisible. Guérin tombera parmi les premiers. Voici le récit de sa mort :

 

..D’autre part est un païen, Grandoine, fils de Capuel ... et va frapper Guérin avec force. Il lui brise son écu vermeil, qui tombe de son cou, lui ouvre la broigne, lui enfonce dans le corps tout son gonfanon bleu et l'abat mort sur une haute roche. Il tue aussi son compagnon Gérier[24]

 

            D'autres Guérin participèrent à la campagne d'Espagne. Guérin III[25], comte palatin des marches de Rhétie et d'Istrie, ainsi que son frère Mile, comte de Narbonne, tous deux fils de Guérin II de Thurgovie et d'Adalinde. Mais plus chanceux que leur homonyme, ils ne se trouvaient pas à l'arrière-garde. Seul Guérin d'Ensérune sera capturé. Il fait l'objet du paragraphe qui suit.

 

* * * * *

 

            Revenant à l'histoire, sachons que les traîtres arabes luttèrent entre eux après le départ des Francs. Soliman fut tué par un de ses anciens complices, à la suite de quoi, l'émir de Cordoue reprit Saragosse.

            Pour replacer les faits à leur juste valeur, la perte de l'arrière-garde ne présentait nullement une catastrophe pour les Francs. Par contre, Charlemagne avait subi un échec humiliant pour son amour-propre et celui du royaume carolingien. C’est pourquoi, pour s’assurer l’obéissance de l’Aquitaine, il la prit autoritairement sous sa souveraineté et la confia à son fils et héritier, le prince Louis.

            Les trouvères s'empareront beaucoup plus tard de ce simple fait divers que représentait la perte de l’arrière-garde à Roncevaux. Pour plaire à leur lectorat, ils enjoliveront l’événement comme une guerre de religions et remplaceront les pillards basques par toute une armée arabe. La défaite d’une poignée de combattants chrétiens écrasés sous le nombre ne pouvait donc qu’être fort honorable et consacrer l’héroïsme des guerriers francs.

            La Chanson de Roland devenait ainsi l'équivalent littéraire de nos monuments aux morts. Mais c'est d'une toute autre classe d'avoir Turolde[26] comme historien de ses hauts faits et d'avoir une chanson de geste comme épitaphe. Le comte Guérin, n'étant pas autrement mentionné, il représente un peu notre Guérin inconnu.

 

GUERIN D'ENSERUNE

 

            L'histoire de Guérin d'Ensérune, ou encore d'Enséüne, est incluse dans la geste de son frère Guillaume d'Orange[27]. Ensérune n'est autre que l'oppidum grec du même nom, près de Nissan[28]. Fils d'Aimery de Narbonne, il avait épousé dame Heutace qui lui avait donné un fils du nom de Vivien.

            Guérin, qui avait combattu à Roncevaux, puis à d’autres combats en Septimanie, avait été capturé par les Sarrasins et était passé pour mort. Il ne réussit à donner de ses nouvelles qu’au bout de six ans. Prisonnier à Orange, les Sarrasins avaient exigé la remise de son fils Vivien contre sa libération. Oriabel, sœur de l'émir, prit l'enfant Vivien en affection. C'était une manière comme une autre d'expliquer et enjoliver comment l'oncle Guillaume s'empara d'Orange et de la charmante Oriabel, dûment baptisée Guibourg, qu'il épousa en grande pompe à l'octave de la Pentecôte.

            L'enfant Vivien rentré en Ensérune apprit que sa mère Heutace était morte de chagrin et que son père Guérin l'avait suivi dans la tombe. Pour venger ses parents, il défia les païens en Arles et tomba aux Aliscamps[29]Date de création : 03/07/2007 @ 16:19
Dernière modification : 19/02/2013 @ 14:07
Catégorie : Histoire des Guérin
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Réaction n°1 

par bernardy1 le 02/11/2017 @ 21:08

Bonjour, à la lecture des origines des Guérins, vous indiquez que Guérin frère de léger, sont fils de St-Arnould de Metz. Ne connaissant que Angésisel et st-Cloud comme fils de St-Arnould de Metz, je m'interroge sur la réalité de cette filiation, pourriez-vous m'indiquer sur quelle source historique Guérin et Léger sont cités comme fils de st-Arnould de Metz? Avec mes remerciements Cordialement.


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